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CRI D’ALARME

trouvai par hasard, en soirée avec cette Mme  de X… que ma maîtresse m’avait conseillé d’embrasser. Habitant le même quartier qu’elle, je lui proposai de la reconduire à sa porte, car elle était seule, ce soir-là. Elle accepta.

Dès que nous fûmes en voiture, je me dis : « Allons, il faut essayer », mais je n’osai pas. Je ne savais comment débuter, comment attaquer.

Puis tout à coup j’eus le courage désespéré des lâches. Je lui dis :

— Comme vous étiez jolie, ce soir.

Elle répondit en riant :

— Ce soir était donc une exception, puisque vous l’avez remarqué pour la première fois ?

Je restais déjà sans réponse. La guerre galante ne me va point décidément. Je trouvai ceci, pourtant, après un peu de réflexion :

— Non, mais je n’ai jamais osé vous le dire.

Elle fut étonnée :

— Pourquoi ?

— Parce que c’est… c’est un peu difficile.

— Difficile de dire à une femme qu’elle est jolie ? Mais d’où sortez-vous ? On doit toujours