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L’ORPHELIN

pas compris : il ne savait rien autre chose que ce qu’il voyait dans les pages.

Pendant deux ans il dévora des volumes en nombre incalculable. Son caractère changea.

Plusieurs fois ensuite, il demanda à Mlle  Source de l’argent, qu’elle lui donna. Comme il lui en fallait toujours davantage, elle finit par refuser, car elle avait de l’ordre et de l’énergie, et elle savait être raisonnable quand il le fallait.

À force de supplications, il obtint d’elle encore, un soir, une forte somme ; mais comme il l’implorait de nouveau quelques jours plus tard, elle se montra inflexible, et elle ne céda plus en effet.

Il parut en prendre son parti.

Il redevint tranquille, comme autrefois, aimant rester assis pendant des heures entières sans faire un mouvement, les yeux baissés, enfoncé en des songeries. Il ne parlait plus même avec Mlle  Source, répondant à peine à ce qu’elle lui disait, par phrases courtes et précises.

Il était gentil pour elle, cependant, et plein de soins ; mais il ne l’embrassait plus jamais.

Le soir, maintenant, quand ils demeuraient face à face des deux côtés de la cheminée, immo-