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L’AMI JOSEPH

femme, qui levait les yeux au ciel, et parfois aussi les mains en signe d’assentiment énergique : « Sous quel gouvernement vivons-nous, mon Dieu ? »

Mme de Méroul ressemblait intellectuellement à son mari, comme s’ils eussent été frère et sœur. Elle savait, par tradition, qu’on doit d’abord respecter le Pape et le Roi !

Et elle les aimait et les respectait du fond du cœur, sans les connaître, avec une exaltation poétique, avec un dévouement héréditaire, avec un attendrissement de femme bien née. Elle était bonne jusque dans tous les replis de l’âme. Elle n’avait point eu d’enfant et le regrettait sans cesse.

Lorsque M. de Méroul retrouva dans un bal Joseph Mouradour, son ancien camarade, il éprouva de cette rencontre une joie profonde et naïve, car ils s’étaient beaucoup aimés dans leur jeunesse.

Après les exclamations d’étonnement sur les changements que l’âge avait apportés à leur corps et à leur figure, ils s’étaient informés réciproquement de leurs existences.