Page:Maupassant - Le Père Milon, 1899.djvu/146

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
142
CONFESSIONS D’UNE FEMME

rapides, le corps penché, comme s’il eût fui. Je fus tellement stupéfaite que je jetai un cri violent ; mais avant que j’eusse pu me retourner, une flamme passa devant mes yeux, une détonation m’étourdit, et je vis l’homme rouler sur le sol comme un loup qui reçoit une balle.

Je poussais des clameurs aiguës, épouvantée, prise de folie ; alors une main furieuse, celle d’Hervé, me saisit à la gorge. Je fus terrassée, puis enlevée dans ses bras robustes. Il courut, me tenant en l’air, vers le corps étendu sur l’herbe, et il me jeta dessus, violemment, comme s’il eût voulu me briser la tête.

Je me sentis perdue ; il allait me tuer ; et déjà il levait sur mon front son talon, quand à son tour il fut enlacé, renversé sans que j’eusse compris encore ce qui se passait.

je me dressai brusquement, et je vis, à genoux sur lui, Paquita, ma bonne, qui, cramponnée comme un chat furieux, crispée, éperdue, lui arrachait la barbe, les moustaches et la peau du visage.

Puis, comme saisie brusquement d’une autre idée, elle se releva, et, se jetant sur le cadavre,