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sauvée

« — Une belle personne, une fausse maigre. Et quel parfum ?

« Je ne comprenais pas ; je répétai : — Comment, quel parfum ?

« Il sourit : « Oui, Madame, le parfum est essentiel pour séduire un homme ; car cela lui donne des ressouvenirs inconscients qui le disposent à l’action ; le parfum établit des confusions obscures dans son esprit, le trouble et l’énerve en lui rappelant ses plaisirs. Il faudrait tâcher de savoir aussi ce que monsieur votre mari a l’habitude de manger quand il dîne avec cette dame. Vous pourriez lui servir les mêmes plats le soir ou vous le pincerez. Oh ! nous le tenons, Madame, nous le tenons. »

« Je m’en allai enchantée. J’étais tombée là vraiment sur un homme très intelligent. »

« Trois jours plus tard, je vis arriver chez moi une grande fille brune, très belle, avec l’air modeste et hardi en même temps, un singulier air de rouée. Elle fut très convenable avec moi. Comme je ne savais trop qui c’était, je l’appelais « mademoiselle » ; alors, elle me dit : « Oh ! Madame peut m’appeler Rose tout court. » Nous commençâmes à causer.

« — Eh bien, Rose, vous savez pourquoi vous venez ici ?

« — Je m’en doute, Madame.