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sentit las comme il ne l’avait jamais été. Ses jambes devenaient molles à ne le plus porter ; toutes ses idées étaient brouillées, il perdait souvenir de tout, ne pouvait plus réfléchir à rien.

Et il s’assit au pied d’un arbre.

Au bout de cinq minutes il dormait.

Il fut réveillé par un grand choc, et, ouvrant les yeux, il aperçut deux tricornes de cuir verni penchés sur lui, et les deux gendarmes du matin qui lui tenaient et lui liaient les bras.

— Je savais bien que je te repincerais, dit le brigadier goguenard.

Randel se leva sans répondre un mot. Les hommes le secouaient, prêts à le rudoyer, s’il faisait un geste, car il était leur proie à présent, il était devenu du gibier de prison, capturé par ces chasseurs de criminels qui ne le lâcheraient plus.

— En route ! commanda le gendarme.

Ils partirent. Le soir venait, étendant sur la terre un crépuscule d’automne, lourd et sinistre.

Au bout d’une demi-heure, ils atteignirent le village.

Toutes les portes étaient ouvertes, car on savait les événements. Paysans et paysannes, soulevés de colère, comme si chacun eût été