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une de ces servantes charnues et saines qu’on a vues danser dans les kermesses du grand peintre.

Mais, il fallait la voir vingt ans plus tôt, la belle campagnarde rusée qui sait, d’un sourire ou d’un mot, se faire donner des vers par tous les poètes, des autographes par tous les illustres, des dessins par tous les peintres.

Sa maison en est pleine. En voici signés Dumas père, d’autres signés Dumas fils. Tous les noms du siècle sont là.


  Belle Ernestine,
  À vos yeux je devine
Que vous voulez un autographe,
   Le voilaphe.


Paroles et musique : signées Jacques Offenbach.

Et chaque peintre passant par Étretat (tous y sont venus) paya son tribut.

Mais si les artistes ont saisi le caractère curieux et si particulier de cette femme, les simples baigneurs souvent la méconnaissent. Et comme elle a de l’esprit, beaucoup d’esprit, elle en rit.

Que de fois des gens sont venus pour contempler la belle Ernestine, des gens qui s’attendaient à des atours, à des manières, à des grâces apprises, à des coquetteries de Parisienne !

Arrivés en face de cette forte fille en robe d’indienne, ils demandaient : « Où donc est la belle Ernestine ? » Et elle ré-