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qu’ils crient : « Au secours ! » On croirait l’équipage noyé de quelque navire, battu encore par le vent, enveloppé de la toile brune et goudronnée que les matelots portent dans les tempêtes, et toujours secoués par la terreur du dernier instant quand la mer les a saisis.

Voici le quartier des prêtres. Une grande galerie d’honneur ! Au premier regard, ils semblent plus terribles à voir que les autres, couverts ainsi de leurs ornements sacrés, noirs, rouges et violets. Mais en les considérant l’un après l’autre, un rire nerveux et irrésistible vous saisit devant leurs attitudes bizarres et sinistrement comiques. En voici qui chantent ; en voilà qui prient. On leur a levé la tête et croisé les mains. Ils sont coiffés de la barrette de l’officiant qui, posée au sommet de leur front décharné, tantôt se penche sur l’oreille d’une façon badine, tantôt leur tombe jusqu’au nez. C’est le carnaval de la mort que rend plus burlesque la richesse dorée des costumes sacerdotaux.

De temps en temps, parait-il, une tête roule à terre, les attaches du cou ayant été rongées par les souris. Des milliers de souris vivent dans ce charnier humain.