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table où il travaillait, un signe quelconque indiquant son passage, la trace d’une manie ou la marque d’une habitude.

Je ne vis rien d’abord qu’un bel appartement d’hôtel. On m’indiqua les changements qu’il y avait apportés, on me montra, juste au milieu de la chambre, la place du grand divan où il entassait les tapis brillants et brodés d’or.

Mais j’ouvris la porte de l’armoire à glace.

Un parfum délicieux et puissant s’envola comme la caresse d’une brise qui aurait passé sur un champ de rosiers.

Le maître de l’hôtel qui me guidait me dit : « C’est là dedans qu’il serrait son linge après l’avoir mouillé d’essence de roses. Cette odeur ne s’en ira jamais maintenant. »

Je respirais cette haleine de fleurs, enfermée en ce meuble, oubliée là, captive ; et il me semblait y retrouver, en effet, quelque chose de Wagner, dans ce souffle qu’il aimait, un peu de lui, un peu de son désir, un peu de son âme, dans ce rien des habitudes secrètes et chères qui font la vie intime d’un homme.

Puis je sortis pour errer par la ville.

Personne ne ressemble moins à un Napolitain qu’un Sicilien. Dans le Napolitain du peuple,