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Et cette race sans défaillance n’a rien laissé d’inférieur. Le même reflet d’impérissable beauté, apparu sous le pinceau des peintres, sous le ciseau des sculpteurs, s’agrandit en lignes de pierre sur la façade des monuments. Les églises et leurs chapelles sont pleines de sculptures de Lucca della Robbia, de Donatello, de Michel-Ange ; leurs portes de bronze sont par Bonannus ou jean de Bologne.

Lorsqu’on arrive sur la piazza della Signoria, en face de la loggia dei Lanzi, on aperçoit ensemble, sous le même portique, l’enlèvement des Sabines, et Hercule terrassant le centaure Nessus, de Jean de Bologne ; Persée avec la tête de Méduse de Benvenuto Cellini ; Judith et Holopherne de Donatello. Il abritait aussi, il y a quelques années seulement, le David de Michel-Ange.

Mais plus on est grisé, plus on est conquis par la séduction de ce voyage dans une forêt d’œuvres d’art, plus on se sent aussi envahi par un bizarre sentiment de malaise qui se mêle bientôt à la joie de voir. Il provient de l’étonnant contraste de la foule moderne si banale, si ignorante de ce qu’elle regarde avec les lieux qu’elle habite. On sent que l’âme délicate, hautaine et raffinée