Page:Maupassant - L’Inutile Beauté, OC, Conard, 1908.djvu/81

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Je n’ai jamais eu d’enfant.

L’autre ripostant :

— Et pas de maîtresse, peut-être ?

Le vieillard prononça résolument un seul mot, un fier aveu :

— Si.

— Et cette maîtresse n’était pas grosse quand vous l’avez chassée ? Soudain, la colère ancienne, étouffée vingt-cinq ans plus tôt, non pas étouffée, mais murée au fond du cœur de l’amant, brisa les voûtes de foi, de dévotion résignée, de renoncement à tout, qu’il avait construites sur elle, et, hors de lui, il cria :

— Je l’ai chassée parce qu’elle m’avait trompé et qu’elle portait en elle l’enfant d’un autre, sans quoi, je l’aurais tuée, monsieur, et vous avec elle.

Le jeune homme hésita, surpris à son tour par l’emportement sincère du curé, puis il répliqua plus doucement :

— Qui vous a dit ça que c’était l’enfant d’un autre ?

— Mais elle, elle-même, en me bravant.

Alors, le vagabond, sans contester cette affirmation, conclut avec un ton indifférent de voyou qui juge une cause :