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surgit en lui contre lui-même, contre cette honteuse insinuation du moi défiant, du moi jaloux, du moi méchant que nous portons tous. Il se blâma, il s’accusa, il s’injuria, tout en se rappelant les visites, les allures de cet ami que sa femme appréciait tant et qu’elle expulsa sans raison sérieuse. Mais soudain d’autres souvenirs lui vinrent, de ruptures pareilles dues au caractère vindicatif de Mme Bondel qui ne pardonnait jamais un froissement. Il rit alors franchement de lui-même, du commencement d’angoisse qui l’avait étreint ; et, se souvenant des mines haineuses de son épouse quand il lui disait, le soir, en rentrant : "J’ai rencontré ce bon Tancret, il m’a demandé de tes nouvelles", il se rassura complètement.

Elle répondait toujours : "Quand tu verras ce monsieur, tu peux lui dire que je le dispense de s’occuper de moi." Oh ! de quel air irrité, de quel air féroce elle prononçait ces paroles. Comme on sentait bien qu’elle ne pardonnait pas, qu’elle ne pardonnerait point… Et il avait pu soupçonner ?… même une seconde ?… Dieu, quelle bêtise !

Pourtant, pourquoi s’était-elle fâchée ainsi ? Elle n’avait jamais raconté le motif précis de