Page:Maupassant - L’Inutile Beauté, OC, Conard, 1908.djvu/101

Cette page n’a pas encore été corrigée

nous étions côte à côte… on eût dit papa et le fils à papa.

Puis nous voilà revenus à la maison. Rien que nous deux. Moi je me disais : "Faut filer, sans un sou." J’avais juste cinquante francs. Qu’est-ce que je pourrais bien trouver pour me venger ?

Il me touche le bras, et me dit :

— J’ai à vous parler.

Je le suivis dans son cabinet. Il s’assit devant sa table, puis, en barbotant dans ses larmes, il me raconte qu’il ne veut pas être pour moi aussi méchant qu’il le disait à maman ; il me prie de ne pas vous embêter… - Ça…, ça nous regarde, vous et moi… - Il m’offre un billet de mille… mille… mille… qu’est-ce que je pouvais faire avec mille francs… moi… un homme comme moi ? Je vis qu’il y en avait d’autres dans le tiroir, un vrai tas. La vue de c’papier-là, ça me donne envie de chouriner Je tends la main pour prendre celui qu’il m’offrait, mais au lieu de recevoir son aumône, je saute dessus, je le jette par terre, et je lui serre la gorge jusqu’à lui faire tourner de l’œil ; puis, quand je vis qu’il allait passer, je le bâillonne, je le ligote, je le déshabille, je le retourne et