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les glaces. Elles l’appelaient, l’attiraient, la forçaient à venir, les yeux fixes, voir, revoir, reconnaître sans cesse, toucher du doigt, comme pour s’en mieux assurer, l’usure ineffaçable des ans. Ce fut d’abord une pensée intermittente reparue chaque fois qu’elle apercevait, soit chez elle, soit ailleurs, la surface polie du cristal redoutable. Elle s’arrêtait sur les trottoirs pour se regarder aux devantures des boutiques, accrochée comme par une main à toutes les plaques de verre dont les marchands ornent leurs façades. Cela devint une maladie, une possession. Elle portait dans sa poche une mignonne boîte à poudre de riz en ivoire, grosse comme une noix, dont le couvercle intérieur enfermait un imperceptible miroir, et souvent, tout en marchant, elle la tenait ouverte dans sa main et la levait vers ses yeux.

Quand elle s’asseyait pour lire ou pour écrire, dans le salon aux tapisseries, sa pensée, un instant distraite par cette besogne nouvelle, revenait bientôt à son obsession. Elle luttait, essayait de se distraire, d’avoir d’autres idées, de continuer son travail. C’était en vain ; la piqûre du désir la harcelait, et bientôt sa main, lâchant le livre ou la plume, se tendait par un mouvement irrésistible vers la petite glace à manche de vieil argent qui traînait sur son bureau. Dans le cadre ovale et ciselé son visage entier s’enfermait comme une figure