Page:Maupassant - Fort comme la mort.djvu/227

Cette page a été validée par deux contributeurs.

pour elle, directement, et, pour le monde, par l’intermédiaire d’un abbé, vicaire de sa paroisse.

Elle avait prié souvent par devoir, comme le soldat monte la garde à la porte du général. Quelquefois elle avait prié parce que son cœur était triste, quand elle redoutait surtout les abandons d’Olivier. Sans confier au ciel, alors, la cause de sa supplication, traitant Dieu avec la même hypocrisie naïve qu’un mari, elle lui demandait de la secourir. À la mort de son père, autrefois, puis tout récemment à la mort de sa mère, elle avait eu des crises violentes de ferveur, des implorations passionnées, des élans vers Celui qui veille sur nous et qui console.

Et voilà qu’aujourd’hui, dans cette église où elle venait d’entrer par hasard, elle se sentait tout à coup un besoin profond de prier, de prier non pour quelqu’un ni pour quelque chose, mais pour elle, pour elle seule, ainsi que déjà, l’autre jour, elle avait fait sur la tombe de sa mère. Il lui fallait de l’aide de quelque part, et elle appelait Dieu maintenant comme elle avait appelé un médecin, le matin même.

Elle resta longtemps sur ses genoux, dans le silence de l’église que troublait par moments un bruit de pas. Puis, tout à coup, comme si une pendule eût sonné dans son cœur, elle eut un réveil de ses souvenirs, tira sa montre, tressaillit en