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follement à chaque bruit connu de sa chambre ? Quand la pendule allait sonner, le petit grincement du ressort qui se dresse lui faisait faire un sursaut ; et il lui fallait ouvrir la bouche pour respirer ensuite pendant quelques secondes, tant il demeurait oppressé.

Il se mit à raisonner avec lui-même sur la possibilité de cette chose :

— Aurais-je peur ?

Non certes, il n’aurait pas peur, puisqu’il était résolu à aller jusqu’au bout, puisqu’il avait cette volonté bien arrêtée de se battre, de ne pas trembler. Mais il se sentait si profondément troublé qu’il se demanda :

— Peut-on avoir peur, malgré soi ?

Et ce doute l’envahit, cette inquiétude, cette épouvante ; si une force plus puissante que sa volonté, dominatrice, irrésistible, le domptait, qu’arriverait-il ? Oui, que pouvait-il arriver ? Certes, il irait sur le terrain, puisqu’il voulait y aller. Mais s’il tremblait ? Mais s’il perdait connaissance ? Et il songea à sa situation, à sa réputation, à son nom.