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CE COCHON DE MORIN

faillit perdre connaissance, embrassa Rivet, embrassa même Mme  Morin qui le rejeta d’une poussée dans son fauteuil.

Mais il ne se remit jamais de ce coup-là, son émotion avait été trop brutale.

On ne l’appelait plus dans toute la contrée que « ce cochon de Morin », et cette épithète le traversait comme un coup d’épée chaque fois qu’il l’entendait.

Quand un voyou dans la rue criait : « Cochon », il se retournait la tête par instinct. Ses amis le criblaient de plaisanteries horribles, lui demandant, chaque fois qu’ils mangeaient du jambon : « Est-ce du tien ? »

Il mourut deux ans plus tard.

Quant à moi, me présentant à la députation, en 1875, j’allai faire une visite intéressée au nouveau notaire de Tousserre, Me  Belloncle. Une grande femme opulente et belle me reçut.

« Vous ne me reconnaissez pas ? dit-elle. »