greniers. Puis on répandit sur le faîte vingt bouteilles d’huile, et on vida, tout au sommet, un sac de menus copeaux. Quelques pas plus loin, une lueur tremblotait dans un petit réchaud de bronze qui demeurait allumé depuis l’arrivée du cadavre.
L’instant était venu. Les parents allèrent chercher le feu. Comme il ne brûlait qu’à peine, on versa dessus un peu d’huile et, brusquement, une flamme s’éleva, éclairant de haut en bas la grande muraille de rochers. Un Indien, penché sur le réchaud, se releva, les deux mains en l’air, les coudes repliés ; et nous vîmes tout à coup surgir, toute noire sur l’immense falaise blanche, une ombre colossale, l’ombre de Bouddha dans sa pose hiératique. Et la petite toque pointue que l’homme avait sur la tête simulait elle-même la coiffure du dieu.
L’effet fut tellement saisissant et imprévu que je sentis mon cœur battre comme si quelque apparition surnaturelle se fût dressée devant moi.
C’était bien elle, l’image antique et sacrée, accourue du fond de l’Orient à l’extrémité de l’Europe, et veillant sur son fils qu’on allait brûler là.
Elle disparut. On apportait le feu. Les copeaux, au sommet du bûcher, s’allumèrent,