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EN VOYAGE.

tendit, et le petit, qui sanglotait, la déposa sur l’herbe auprès de lui.

La nuit était complète. Les deux misérables êtres, anéantis, ne se tenaient plus qu’à peine. Le grand, enfin, se sentant perdu, murmura encore : « Adieu, petit frère, embrasse maman et papa. » Et ses doigts paralysés s’ouvrirent. Il plongea et ne reparut plus…

Le petit, resté seul, se mit à l’appeler furieusement : « Paul ! Paul ! » ; mais l’autre ne revenait point.

Alors il s’élança dans la montagne, tombant dans les pierres, bouleversé par la plus grande angoisse qui puisse étreindre un cœur d’enfant, et il arriva, avec une figure de mort, dans le salon où attendaient ses parents. Et il se perdit de nouveau en les amenant au sombre réservoir. Il ne retrouvait plus sa route. Enfin il reconnut la place. « C’est là, oui, c’est là. »

Mais il fallut vider cette citerne ; et le propriétaire ne le voulait point permettre, ayant besoin d’eau pour ses citronniers.

Enfin on retrouva les deux corps, le lendemain seulement.


Vous voyez, ma chère amie, que c’est là un simple fait-divers. Mais si vous aviez vu le trou lui-même, vous auriez été comme moi