Page:Maupassant - Clair de lune, 1905.djvu/175

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
167
mademoiselle cocotte

se débarrasser de Cocotte. L’homme désolé chercha à la placer. Personne n’en voulut. Alors il se résolut à la perdre, et il la confia à un voiturier qui devait l’abandonner dans la campagne de l’autre côté de Paris, auprès de Joinville-le-Pont.

Le soir même, Cocotte était revenue.

Il fallait prendre un grand parti. On la livra, moyennant cinq francs, à un chef de train allant au Havre. Il devait la lâcher à l’arrivée.

Au bout de trois jours, elle rentrait dans son écurie, harassée, efflanquée, écorchée, n’en pouvant plus.

Le maître, apitoyé, n’insista pas.

Mais les chiens revinrent bientôt plus nombreux et plus acharnés que jamais. Et comme on donnait, un soir, un grand dîner, une poularde truffée fut emportée par un dogue, au nez de la cuisinière qui n’osa pas la lui disputer.

Le maître, cette fois, se fâcha tout à fait, et, ayant appelé François, il lui dit avec colère : « Si vous ne me flanquez pas cette bête à l’eau avant demain matin, je vous fiche à la porte, entendez-vous ? »