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demeurent limitées ; du haut en bas de l’échelle sociale, elle reste la même. Des filles épousées deviennent en peu de temps de remarquables femmes du monde, elles s’adaptent au milieu où elles se trouvent. Un proverbe dit qu’on a vu des rois épouser des bergères. Nous coudoyons chaque jour des bergères, et même moins, qui sont devenues des dames et qui tiennent leur rang tout comme d’autres.

Chez les femmes, il n’est point de classes. Elles ne sont quelque chose dans la société que par ceux qui les épousent ou qui les patronnent. En les prenant pour compagnes, légitimes ou non, les hommes sont-ils donc toujours si scrupuleux sur leur provenance ? Faut-il l’être davantage en les prenant pour sujets littéraires ?



M. Taine dit en sa lettre : « L’honneur et l’esprit sont toujours plus ou moins des plantes de serre… »

Pour l’esprit, je ne le conteste pas ; quant à l’honneur ?… Je me rappelle qu’un jour on discutait cette question devant une jeune femme de province, mais du meilleur monde, et aristocrate jusqu’aux ongles. Elle s’irritait d’entendre dire qu’il y eût plus de sentiments droits et simplement nobles dans les classes moyennes que dans les classes hautes. Puis, comme on citait des exemples, elle se mit à rire tout à