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lontaire des gens surpris ; je glissai… Ce fut une chose lamentable, atroce… j’étais assis dans cette fange…, mon pantalon était devenu foncé, ma chemise blanche tachetée de boue ; mon chapeau nageait à côté de moi. La voix furieuse, enrouée à force de crier, hurlait toujours : « Coco, coco ! » Et devant moi, vingt personnes, que secouait un rire formidable, faisaient d’horribles grimaces en me regardant.

« Je rentrai chez moi en courant. Je me changeai. L’heure de l’audience était passée. »

Le manuscrit se terminait ainsi :

« Fais-toi l’ami d’un marchand de coco, mon petit Pierre. Quant à moi, je m’en irai content de ce monde, si j’en entends crier un, au moment de mourir. »

Le lendemain, je rencontrai aux Champs-Élysées un vieux, très vieux porteur de fontaine qui paraissait fort misérable. Je lui donnai le billet de cent francs de mon oncle. Il tressaillit stupéfait, puis me dit : « Grand merci, mon petit homme, cela vous portera bonheur. »

GUY DE VALMONT.

La Mosaïque, 1876.[1]

  1. Date à vérifier