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d’une lèvre avide et frémissante, essayant de la renverser sur les coussins du wagon.

Elle se dégagea d’un grand effort, et, se levant avec vivacité :

— Oh ! voyons, Georges, finissez. Nous ne sommes pourtant plus des enfants, nous pouvons bien attendre Rouen.

Il demeurait assis, très rouge, et glacé par ces mots raisonnables ; puis, ayant repris quelque sang-froid :

— Soit, j’attendrai, dit-il avec gaieté, mais je ne suis plus fichu de prononcer vingt paroles jusqu’à l’arrivée. Et songez que nous traversons Poissy.

— C’est moi qui parlerai, dit-elle.

Elle se rassit doucement auprès de lui.

Et elle parla, avec précision, de ce qu’ils feraient à leur retour. Ils devaient conserver l’appartement qu’elle habitait avec son premier mari, et Duroy héritait aussi des fonctions et du traitement de Forestier à la Vie Française.

Avant leur union, du reste, elle avait réglé, avec une sûreté d’homme d’affaires, tous les détails financiers du ménage.

Ils s’étaient associés sous le régime de la séparation de biens, et tous les cas étaient prévus qui pouvaient survenir : mort, divorce, naissance d’un ou de plusieurs enfants. Le