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de file, il n’y a ni amitié, ni reconnaissance, ni dévouement, ni générosité, ni rien, rien, qui tienne, quand le chauvinisme est mis en mouvement par un intrigant quelconque. Nous a-t-on balancés, depuis un mois, avec cette amitié des peuples !



Une autre balançoire dont le mouvement s’arrête, heureusement, est la campagne des Kroumirs. Il ne s’agit point, ici, de la portée ni des résultats politiques de cette expédition, mais de son retentissement dans les esprits.

Morbleu ! sommes-nous assez partis en guerre ? Les journaux, depuis six semaines, sont pleins de dépêches héroïques ; les reporters eux-mêmes étaient mis en campagne, la plume d’une main, le revolver de l’autre. On savait le nombre des bataillons pris à tous les coins de la France, noms des officiers, l’âge des colonels et la longueur de leurs éperons. On vendait des cartes du pays kroumir que personne ne connaît ; et, chaque soir,