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province d’alger

sud en ce terrible mois d’août. Le Sud ! quel mot rapide, brûlant ! Le Sud ! Le feu ! Là-bas, au Nord, on dit, en parlant des pays tièdes : « le Midi ». Ici, c’est « le Sud ».

Je regardais cette syllabe si courte qui me paraissait surprenante comme si je ne l’avais jamais lue. J’en découvrais, me semblait-il, le sens mystérieux. Car les mots les plus connus comme les visages souvent regardés ont des significations secrètes, dont on s’aperçoit tout d’un coup, un jour, on ne sait pourquoi.

Le Sud ! Le désert, les nomades, les terres inexplorées et puis les nègres, tout un monde nouveau, quelque chose comme le commencement d’un univers ! Le Sud ! comme cela devient énergique sur la frontière du Sahara.

Dans l’après-midi, j’allai visiter le Ksar.

Boukhrari est le premier village où l’on rencontre des Oulad-Naïl. On est saisi de stupéfaction à l’aspect de ces courtisanes du désert.

Les rues populeuses sont pleines d’Arabes couchés en travers des portes, en travers de la route, accroupis, causant à voix basse ou dormant. Partout leurs vêtements flottants et blancs semblent augmenter la blancheur unie des maisons. Point de taches, tout est blanc ; et soudain une