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province d’alger

un monticule et à peine distinct du sol, tant il en a pris la coloration monotone, un grand village se dresse sur le ciel, c’est le ksar de Boukhrari.

Au pied du cône de poussière qui porte ce vaste village arabe, quelques maisons sont cachées dans le mouvement de la colline : elles forment la commune mixte.

Le ksar de Boukhrari est un des plus considérables villages arabes de l’Algérie. Il se trouve juste sur la frontière du Sud, un peu au delà du Tell, dans la zone de transition entre les pays européanisés et le grand Désert. Sa situation lui donne une singulière importance politique, car elle en fait une sorte de trait d’union entre les Arabes du littoral et les Arabes du Sahara. Aussi a-t-il toujours été le pouls des insurrections. C’est là qu’arrive le mot d’ordre, c’est de là qu’il repart. Les tribus les plus éloignées envoient leurs gens pour savoir ce qui se passe à Boukhrari. On a l’œil sur ce point de toutes les parties de l’Algérie.

L’administration française, seule, ne s’occupe point de ce qui se trame à Boukhrari. Elle en a fait une commune de plein exercice, sur le modèle des communes de France, administrée par un maire, vieux paysan à l œil endormi, flanqué