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province d’alger

par les maîtres de l’auberge, sont caressants et tranquilles. Un tout jeune, pris l’autre semaine, reste un peu sauvage encore.

Sitôt que l’on demeure immobile, ils approchent, vous guettent, vous observent. On dirait que le voyageur est la grande distraction des habitants de ce vallon. Dans certains jours, pourtant, on n’en aperçoit pas un seul.

Après l’auberge du Ruisseau-des-Singes, une allée s’étrangle encore ; et soudain, à gauche, deux grandes cascades s’élancent presque du sommet du mont : deux cascades claires, deux rubans d’argent. Si vous saviez comme c’est doux à voir des cascades, sur cette terre d’Afrique ! On monte, longtemps, longtemps. La gorge est moins profonde, moins boisée. On monte encore, la montagne se dénude peu à peu. Ce sont des champs à présent ; et, quand on parvient au faîte, on rencontre des chênes, des saules, des ormeaux, les arbres de nos pays. On couche à Médéah, blanche petite ville toute pareille à une sous-préfecture de France.

C’est après Médéah que recommencent les féroces ravages du soleil. On franchit une forêt pourtant, mais une forêt maigre, pelée, montrant partout la peau brûlante de la terre bientôt vain-