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la province d’oran

gnols. Personne ne s’est occupé de ce désastre français.)

Puis nous passons par des défilés étroits entre deux montagnes qu’on dirait incendiées depuis peu, tant elles ont la peau rouge et nue ; nous contournons des pics, nous filons le long des pentes, nous faisons des détours de dix kilomètres pour éviter les obstacles, puis nous nous précipitons dans une plaine, à toute vitesse, en zigzaguant toujours un peu, comme par suite de l’habitude prise.

Les wagons sont tout petits, la machine grosse comme celle d’un tramway. Elle semble parfois exténuée, râle, geint, ou rage, va si doucement qu’on la suivrait au pas, et tout à coup elle repart avec furie.

Toute la contrée est aride et désolée. Le Roi d’Afrique, le Soleil, le grand et féroce ravageur a mangé la chair de ces vallons, ne laissant que la pierre et une poussière rouge où rien ne pourrait germer.

Saïda ! c’est une petite ville à la française qui ne semble habitée que par des généraux. Ils sont au moins dix ou douze et paraissent toujours en conciliabule. On a envie de leur crier : « Où est aujourd’hui Bou-Amama, mon général ? » La