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le zar’ez

passé, frôlant le reptile qu’il regarde de nouveau, hors d’atteinte, de l’autre bout de la caisse.

Et cela dure un quart d’heure, vingt minutes, parfois davantage. La léfaa, exaspérée, se fâche, rampe vers louran qui fuit sans cesse, plus souple que le regard, revient, tourne, s’arrête, repart, épuise et affole son redoutable adversaire. Puis soudain, ayant choisi l’instant, il file dessus si vite qu’on aperçoit seulement la vipère convulsée, étranglée par la forte mâchoire triangulaire du lézard qui l’a saisi par le cou, derrière les oreilles, juste à la place où la prennent les Arabes.

On songe en voyant la lutte de ces petites bêtes au fond d’une caisse à savon, aux courses de taureaux d’Espagne dans les cirques majestueux. Il serait plus terrible cependant de déranger ces infimes combattants que d’affronter la colère beuglante de la grosse bête armée de cornes aiguës.

On rencontre souvent dans le Sahara un serpent affreux à voir, long souvent de plus d’un mètre et pas plus gros que le petit doigt. Aux environs de Bou Saada ce reptile inoffensif inspire aux Arabes une terreur superstitieuse. Ils prétendent qu’il perce comme une balle les corps