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le zar’ez

la poussière brûlante, comme nous venions d’arriver au campement, auprès d’un puits d’eau bourbeuse et saumâtre qui nous parut cependant exquise, le lieutenant me secoua soudain au moment où j’allais me reposer sous la tente, et me dit, en me montrant l’extrême horizon vers le sud : « Ne voyez-vous rien là-bas ? »

Après avoir regardé, je répondis : « Si, un tout petit nuage gris. »

Alors le lieutenant sourit : « Eh bien, asseyez-vous là et continuez à regarder ce nuage. »

Surpris, je demandai pourquoi. Mon compagnon reprit : « Si je ne me trompe, c’est un ouragan de sable qui nous arrive. »

Il était environ quatre heures, et la chaleur se maintenait encore à quarante-huit degrés sous la tente. L’air semblait dormir sous l’oblique et intolérable flamme du soleil. Aucun souffle, aucun bruit, sauf le mouvement des mâchoires de nos chevaux entravés, qui mangeaient l’orge, et les vagues chuchotements des Arabes qui, cent pas plus loin, préparaient notre repas.

On eût dit cependant qu’il y avait autour de nous une autre chaleur que celle du ciel, plus concentrée, plus suffocante, comme celle qui vous oppresse quand on se trouve dans le voisi-