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le zar’ez

Puis le soir vient ; on dine. Un calme profond tombe sur la terre calcinée. Les chiens des douars commencent à hurler au loin, et les chacals leur répondent.

On s’étend sur les tapis sous le ciel criblé d’étoiles, qui semblent humides, tant leur clarté scintille ; et alors on cause longtemps, très longtemps. Tous les souvenirs reviennent, doux, précis et faciles à dire, sous ces nuits tièdes si pleines d’astres. Tout autour de la tente de l’officier, des Arabes sont étendus par terre ; et, sur une ligne, les chevaux, entravés par les jambes de devant, restent debout, avec un homme de garde auprès de chacun d’eux.

Ils ne doivent pas se coucher, et ils restent toujours debout, ces chevaux ; car la monture d’un chef ne peut pas être fatiguée. Sitôt qu’ils essayent de s’étendre, un Arabe se précipite et les force à se relever.

Mais la nuit s’avance. Nous nous allongeons sur les tapis de laine épaisse, et parfois, dans les réveils subits, nous apercevons partout, sur la terre nue qui nous environne, des êtres blancs étendus et dormant, comme des cadavres dans des linceuls.

Un jour, après une marche de dix heures dans