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province d’alger

Cette question de mœurs m’amène à un sujet bien difficile.

Nos idées, nos coutumes, nos instincts différent si absolument de ceux qu’on rencontre en ces pays qu’on ose à peine parler chez nous d’un vice si fréquent là-bas que les Européens ne s’en scandalisent même plus. On arrive à en rire au lieu de s’indigner. C’est là une matière fort délicate, mais qu’on ne peut passer sous silence quand on veut essayer de raconter la vie arabe, de faire comprendre le caractère particulier de ce peuple.

On rencontre ici à chaque pas ces amours antinaturelles entre êtres du même sexe que recommandait Socrate, l’ami d’Alcibiade.

Souvent, dans l’histoire, on trouve des exemples de cette étrange et malpropre passion à laquelle s’abandonnaït César, que les Romains et les Grecs pratiquèrent constamment, que Henri III mit à la mode en France et dont on suspecta bien des grands hommes. Mais ces exemples ne sont cependant que des exceptions d’autant plus remarquées qu’elles sont assez rares. En Afrique, cet amour anormal est entré si profondément dans les mœurs que les Arabes semblent le considérer comme aussi naturel que l’autre.