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vestibule; un autre spahi balayait. Dans la chambre, un troisième faisait le lit. Un quatrième, au loin, chantait dans l'écurie, tandis que le véritable ordonnance, le jeune Mohammed, fumait des cigarettes, couché sur un tapis.

Stupéfait, le lieutenant appela un de ces remplaçants inattendus, et, lui montrant ses camarades:

- Qu'est-ce que vous f...ichez ici, vous autres?

L'Arabe immédiatement s'expliqua:

- Mon lieutenant, c'est le lieutenant indigène qui nous a envoyés. (Chaque lieutenant français, en effet, est doublé d'un officier indigène qui lui est subordonné.)

- Ah! c'est le lieutenant indigène. Et pourquoi ça?

Le soldat reprit:

- Mon lieutenant, il nous a dit: "Allez-vous-en chez le lieutenant et faites-moi tout l'ouvrage de Mohammed. Mohammed il doit rien faire, parce que c'est la femme du lieutenant."

Cette attention délicate coûta d'ailleurs à l'officier deux mois d'arrêts.

Ce qui prouve combien ce vice est entré dans les moeurs des Arabes, c'est que tout prisonnier qui leur tombe dans les mains est