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pour nous asseoir, et selon l'usage, on saisit les Arabes, on les bouscule, on les rejette de leur banc et ils s'en vont, impassibles. D'autres se tassent pour leur faire place. Sur une estrade, au fond, les quatre tambourineurs, avec des poses extatiques, battent frénétiquement la peau tendue des instruments; et le maître, le grand nègre, se promène d'un pas majestueux, en soufflant furieusement dans sa flûte enragée, sans un repos, sans une défaillance d'une seconde.

Alors, deux Oulad-Naïl se lèvent, vont se placer aux extrémités de l'espace laissé libre entre les bancs et elles se mettent à danser. Leur danse est une marche douce que rythme un coup de talon faisant sonner les anneaux des pieds. A chacun de ces coups, le corps entier fléchit dans une sorte de boiterie méthodique; et leurs mains, élevées et tendues à la hauteur de l'oeil, se retournent doucement à chaque retour du sautillement, avec une vive trépidation, une secousse rapide des doigts. La face un peu tournée, rigide, impassible, figée, demeure étonnamment immobile, une face de sphinx, tandis que le regard oblique reste tendu sur les ondulations de la main, comme fasciné par ce mouvement