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quelques mécréants et quelques nobles, qui n'aient point une foi violente.

Ces exceptions sont infiniment rares; je n'en pourrais citer qu'une seule.

Au moment de partir pour une marche de vingt jours dans le sud, un officier du cercle de Boghar demanda aux trois spahis qui l'accompagnaient de ne point faire le ramadan, estimant qu'il ne pourrait rien obtenir de ces hommes exténués par le jeûne. Deux des soldats ont refusé, le troisième répondit:

- Mon lieutenant, je ne fais pas le ramadan. Je ne suis pas un marabout, moi, je suis un noble.

Il était, en effet, de grande tente, fils d'une des plus anciennes et des plus illustres familles du désert.

Une coutume singulière persiste, qui date de l'occupation, et qui parait profondément grotesque quand on songe aux résultats terribles que le ramadan peut avoir pour nous. Comme on voulait, au début, se concilier les vaincus, et comme flatter leur religion est le meilleur moyen de les prendre, on a décidé que le canon français donnerait le signal de l'abstinence pendant l'époque consacrée. Donc, au matin, dès les premières rougeurs de l'aurore, un coup de canon commande le jeune;