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Après quelques heures de route on atteint les premières pentes de l’Atlas. Le train monte, souffle, ne marche plus qu’à peine, serpente sur le flanc des côtes arides, passe auprès d’un lac immense formé par trois rivières que garde, amassées dans trois vallées, le fameux barrage de l’Habra. Un mur colossal, long de cinq cents mètres, haut et large de quarante mètres, contient, suspendus au-dessus d’une plaine démesurée, quatorze millions de mètres cubes d’eau.

(Ce barrage s’est écroulé l’an suivant, noyant des centaines d’hommes, ruinant un pays entier. C’était au moment d’une grande souscription nationale pour des inondés hongrois ou espagnols. Personne ne s’est occupé de ce désastre français.)

Puis nous passons par des défilés étroits entre deux montagnes, qu’on dirait incendiées depuis peu, tant elles ont la peau rouge et nue ; nous contournons des pics, nous filons le long des pentes, nous faisons des détours de dix kilomètres pour éviter les obstacles, puis nous nous précipitons dans une plaine, à toute vitesse, en zigzaguant toujours un peu, comme par suite de l’habitude prise.

Les wagons sont tout petits, la machine