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précis de caresses entrés en lui maintenant, comme en tous ceux qui ont longtemps vécu dans une amoureuse intimité. La crise revenait à la même heure, faite de souvenirs et de désirs où se mêlait de la rancune, un recommencement de colère contre cette gueuse dont il avait souffert, dont il souffrait encore. Il se félicitait pourtant de l'avoir enfin lâchée, et se répétait comme pour s'affermir, se consoler, se convaincre qu'il ne devait pas la regretter: "Cristi, quelle chance que ce soit fini!" Il rentra tout doucement, gagna sa chambre, se mit au lit, et, comme il était fatigué du voyage et de sa journée, il s'endormit presque tout de suite.


II

Robert Mariolle fut réveillé tôt par une rumeur de mouvement dans l'hôtel. A travers les vitres de sa fenêtre dont il n'avait point fermé l'auvent, une inondation de soleil faisait de sa chambre aux murs clairs, aux rideaux blancs, une petite cuve de lumière si vive qu'il ne put rester couché.

Aussitôt levé, il sortit et se mit à suivre le couloir étroit dont les portes semblaient gardées par des souliers, des bottines ou des bottes qui venaient d'être cirés. Ils racontaient, ces morceaux de cuir délicats ou grossiers, la vie, les moeurs, l'élégance et la condition sociale de celui, de celle ou de ceux couchés encore derrière le mur.

Mariolle y songeait, souriant, plein de bonne humeur matinale, d'envie d'essayer d'entrer quand il voyait solitaire, et toute fine, la chaussure de deux pieds mignons, ou plein de dédain