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Ajoutons que le tempérament particulier de l’écrivain donnera aux choses qu’il décrira une couleur spéciale, une allure propre, selon la nature de son esprit. Il a défini ainsi son naturalisme : « La nature vue à travers un tempérament » ; et cette définition est la plus claire, la plus parfaite qu’on puisse donner de la littérature en général. Ce TEMPÉRAMENT est la marque de fabrique ; et le plus ou moins de talent de l’artiste imprimera une plus ou moins grande originalité aux visions qu’il nous traduira.

Car la vérité absolue, la vérité sèche, n’existe pas, personne ne pouvant avoir la prétention d’être un miroir parfait. Nous possédons tous une tendance d’esprit qui nous porte à voir, tantôt d’une façon, tantôt d’une autre ; et ce qui semble vérité à celui-ci semblera erreur à celui-là. Prétendre faire vrai, absolument vrai, n’est qu’une prétention irréalisable, et l’on peut tout au plus s’engager à reproduire exactement ce qu’on a vu, tel qu’on l’a vu, à donner les impressions telles qu’on les a senties, selon les facultés de voir et de sentir, selon l’impressionnabilité propre que la nature a mise en nous.