de la boue jusqu’aux cuisses ou bien jusqu’aux chevilles, en équilibre sur des rondins. Pas de ponts, parfois pas d’arbre tombé pour traverser les petits marigots. On traverse, de l’eau jusqu’au ventre, ou bien on suit le lit formé de sable, de criques peu prof ondes, pour éviter des bois tombés ou de profonds marécages.
Et l’on grimpe à nouveau. Les racines agrippant l’humus forment un escalier aux marches inégales et traîtresses. De· racine en racine l’on monte, l’on trébuche, on se prend les pieds dedans, on glisse… La racine cède et vous voilà par terre, mais enfin elles sont là, utiles, indispensables, que ce soit pour monter, et ce sont les barreaux d’une échelle, que ce soit pour descendre, ce sont des marches raides. Pour traverser les marécages et même les rivières, elles sont partout, gigantesques, torves, monstrueuses, fourmillant de radicelles qui, comme un filet étreignent la terre fluide que les pluies entraînent et, lorsque la terre s’en va, il reste un trou et ce trou est pour votre pied immanquablement, le coinçant comme un piège à renard, vous faisant craindre l’entorse ou la fracture et jurer plus qu’il ne l’est permis à un honnête homme.
Sinon, rien d’extraordinaire, le vert brutal des feuilles lasse, fatigue. On aspire à voir une éclaircie, une plaine jusqu’à l’horizon puis des couleurs, d’autres couleurs. Le vert étreint comme un drap de pompes funèbres ; avec le soleil, on y découvre mille nuances, joliment appliquées là où on ne soupçonnait rien. Avec le soleil, la forêt vibre, vit, superbe ; mais le soleil effleure les cîmes, ne condescendant à percer qu’au hasard d’une éclaircie et puis, c’est encore et toujours la demi-obscurité, le regard butte sur des troncs et, s’il veut s’amuser à les suivre, il se perd, pris de vertige, à vingt-cinq ou