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je prends la piste étroite qui mène au village indien… je marche, je ne vois rien, sinon un territoire minuscule bosselé de cases de feuilles de palmier, cerné d’un triple rang de fils de fer barbelés rouillés et derrière les barbelés, errant lamentablement comme des fauves repus, des hommes à peine vêtus de loques infâmes avec de longues chevelures et que je qualifiai aussitôt d’Indiens en cage.

C’est à certain père jésuite que je pensais lorsque je franchis le porche conduisant à cette triste réserve… un père jésuite sympathique en diable, pittoresque et sans façon, qui me convia en sa compagnie et celle de quelques amis qui arrivaient précisément des régions que je pensais visiter.

Ne pouvant apporter à la conversation fort animée qui s’établit aussitôt aucune lumière positive à l’égard des sujets abordés, je me contentais d’écouter, pensant tôt ou tard tirer profit des précieux enseignements glanés par ces hommes au cours de leurs pérégrinations de broussards avertis, qui couraient rivières et forêts soit pour propager leur foi, soit pour enrichir leurs connaissances et contribuer à l’étude géographique des États peu connus de l’intérieur brésilien.

Il y avait là, en même temps que deux compagnons du père jésuite, un cartographe, un ethnologue et un officier détaché en garnison aux frontières de la Colombie.

Tard dans la soirée, nous passâmes sur la terrasse qui s’ouvrit à seize étages au-dessus de la plage du Flamengo et découvrait un paysage magnifique où tout contribuait pour ajouter à la quiétude d’une vie exempte de soucis. Ce fut à l’instant précis où nous ressentions si