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colonnes d’hommes qui partent chercher la fortune et tombent sur une embuscade…

— Les démons rouges et hurlants qui pillent, tuent, incendient…

— Les Winchesters crachotantes, puis muettes, submergées par le flot sauvage, les chevaux : qui fuient, les survivants perdus dans un désert morne, agonisant sous le soleil implacable, traqués par les fauves…

— A quelques heures de Rio de Janeiro, dans un siècle de bombe atomique et de super-civilisation…

Nous écoutions religieusement ces évocations dithyrambiques, rêvant à ces terres demeurées blanches sur les cartes brésiliennes, aux Indiens qui les peuplent, à l’or et au diamant que roulent ses rivières…

Nous avions vingt ans, nos ainés peut-être trente… L’idée de pouvoir un jour fuir le littoral où nous végétions sans espoir, à la recherche de cette aventure que décrivait si bien Tad, nous donnait la force de rester à Rio et d’aller de l’avant.

Chaque soir, Tad s’exaltait, tendait ses bras maigres pour raconter ses histoires avec des accents de prophète touché par la grâce divine.

Son corps efflanqué tressaillant d’aise, il extirpait de ses poches des coupures de journaux toujours très récentes qu’il dénichait je ne sais où et lisait à haute voix. Nous connaissions bien d’ailleurs ce genre d’article exploité avec bonheur par de nombreux hebdomadaires européens qui se souciaient fort peu de la véracité de leurs informations et comblaient, au gré de leur fantaisie, les rivières de rochers d’or… (pourvu que ces rivières aient un nom sud-améri-