Page:Maufrais Aventures au Matto Grosso 1951.djvu/31

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

s’illusionnaient guère quant au résultat du pari engagé avec Tad.

— Partira… partira pas, ricanaient les faces hilares au-dessus de leurs demis de bière bru.ne.

— Partira, assurais-je furieux.

Rien ne m’autorisait encore à m’engager de la sorte, mais poussé par l’esprit de contradiction qui forme l’essentiel de mon caractère et, justement parce que les gens sensés ou sceptiques s’accordaient à juger la chose impossible, je certifiais que mon départ chez les Chavantes était imminent. Ignorant encore les moyens propres à séduire le chef de l’expédition en partance, je laissais à mon étoile et aux jours à venir le soin de régler la question.

Ce fut Tad, d’ailleurs, qui, avec une suffisance hargneuse d’aventurier pantouflard commença à parler des Indiens et à réveiller en moi les velléités d’aventures qui sommeillaient depuis bon nombre d’années. J’étais venu au Brésil avec le secret espoir de pouvoir un jour m’en foncer dans les terres amazoniennes demeurées inexplorées. L’argent, hélas, manquait pour mettre ce beau projet à exécution. Il me fallait attendre une opportunité, et mes jours se passaient à l’espérer.

Aux dires de Tad, l’intérieur brésilien était truffé d’Indiens et de hors la loi, pétaradant des coups de feux qui se distribuaient avec une générosité abusive dans les villages de prospecteurs.

— Voyez Rio de Janeiro, s’exclamait-il pathétiquement … et, à deux heures d’avion de cette avenue plantée de gratte-ciel, ronflant du bruit de milliers de moteurs, essayez d’imaginer les forêts, les pampas désertiques, les