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A la fin, je n’en peux plus, je voudrais dormir ; las, je ne peux que somnoler, doucement abruti par les grandes claques qu’à chaque instant, exaspéré, je me distribue généreusement, sans arriver d’ailleurs à tuer une seule de ces bêtes fauves et sanguinaires.

Sur le tard de l’après-midi, je perçois le bruit de la coque frottant le sable d’une crique peu profonde. L’accostage est rendu difficile par les bois morts qui traînent un peu partout, en encombrant les abords de la berge. Nous taillons rapidement une piste étroite mais suffisante pour nous ouvrir un passage jusqu’à une sorte de clairière immense qui creuse la forêt.

Il n’y a plus de moustiques maintenant.

Je respire.

Pas longtemps. Il y a des mouches. Par milliers.

Sur la figure, les claques reprennent. On les écrase par gros paquets verdâtres et sanguinolents.

Il y a partout des lianes très grosses et vrillées qui pendent et forment une vaste toile d’araignée.

J’essaie de m’accrocher à l’une d’entre elles. Elle cède sous mon poids et je me retrouve par terre, écrasé sous une masse d’humus et de bois mort, soudain rendu sceptique quant aux exploits de Tarzan qui captiva mon enfance.

Caisses et sacs sont rapidement déchargés sur la berge, puis entassés au centre de la clairière. Les hamacs sont tendus, les moustiquaires semblent planer dans la masse sombre de la forêt. D’un seul coup, c’est la nuit. Alors, un feu rassemble les hommes qui mastiquent en silence quelques poignées de farine de manioc et une lamelle de viande sèche.