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CHAPITRE VIII


QUARANTE degrés à l’ombre. Torse nu, affalé, inerte sur le plancher de la barque qui se laisse aller au fil du courant, tous les quarts d’heure je bois de grandes calebasses de l’eau tiède et fade de la rivière.

Mon estomac est une éponge, la sueur coule avec entrain et les moustiques s’y empêtrent, mordant avec voracité comme à leur habitude, créant par leurs attaques incessantes une sorte de folie rageuse qui pourrait amener à de regrettables extrémités, car cette infâme petite bestiole stupide est la chose la plus immonde, la plus odieuse, la plus empoisonnante, en un mot la plus emmerdante qu’il soit au monde ; elle harcèle, elle pique, elle se fourre partout et principalement dans le nez, les yeux, la bouche, les oreilles, de manière à aveugler, étourdir, provoquant de retentissants éternuements, se précipitant dans la bouche ouverte une seconde afin d’aspirer une bouffée d’air frais, chatouillant l’œsophage, provoquant la nausée, et enfin piquant partout à même la chair ou au travers de la chemise, allant aussi se nicher dans les chaussettes, dans les bottes, partout, boursouflant l’épiderme entier de cloques et de boutons rouges qui, sans plus attendre, suppurent à vue d’œil, grattent, cuisent…