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douceâtre qui semble paralyser le cerveau, embuer les yeux…

La petite fille allongée sur une natte dort, ou semble dormir, je n’en sais rien ; elle est absolument nue et sans doute sous l’influence des herbes, un étrange désir érotique me saisit que j’ai grand’peine à réprimer.

Le sorcier s’accroupit sur la gamine, pèse de tout son poids d’homme. Un grand silence règne, mes oreilles bourdonnent. Les mains fébriles du sorcier courent sur le visage, sur les cheveux épandus, sur tout le corps…

Puis il saisit à pleines mains (sans sentir la brûlure) la pipe ardente, plaque le fourneau sur la chair qui grésille (sur une pommette, sur l’autre), il va lentement, une odeur de peau grillée me saisit aux narines. La petite fille tremble doucement, sans gémir, les yeux clos.

Deux ronds de peau brülée boursouflent ses pommettes. Le vieux sorcier burine la brülure avec un os taillé. Soigneusement, sans se presser, jusqu’à découper la chair suivant les cercles, gravant ainsi profondément la marque de la race des Karajas. Il essuie avec du coton le sang qui coule sur le petit visage ; avec son doigt, il passe sur les blessures du « genipapo ».

La fille se relève, elle disparait vers le village, je sors aussi, puis Meirelles, puis Malhoa, sans un mot nous nous séparons.

L’air frais peu à peu dissipe les vapeurs tièdes qui obscurcissent mon cerveau.

Un grand bien-être pénètre en moi.

— Ils vont se marier, dit Malhoa… Retowokàn auri.