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pressent en si grand nombre qu’une seule décharge de chevrotine en tuerait plusieurs dizaines. Ce sont les « boueux » du village. Lorsque les alentours de la case sont trop empuantis, les Indiens abandonnent leur demeure, après avoir barré l’entrée de feuilles de palmier. Ils s’en vont demander asile aux voisins pour laisser s’ébattre en toute liberté les urubus qui en quelques jours font place nette. Alors les Indiens reviennent.

Les urubus royaux planent avec grâce, leur envergure atteint souvent celle des aigles andins et leur plumage de jais est piqué de taches jaunes, rouges et oranges…

— Mankré manakré… irambu.

— Vamos, frances.

Nous avançons dans la forêt, précédés de quelques Indiens armés de lances. Il n’a pas plu depuis une semaine. Les branches se brisent sous mes bottes avec un craquement sec, l’humus froissé, élastique et glissant bruisse. Nous marchons toute la matinée traversant une sorte de pampa hérissée de roches brunes semblables à des menhirs. Malhoa nous dit, très vague :

— C’est là…

Nous cherchons, sans succès, tout un après-midi, suivant pas à pas Malhoa qui, soudain, semble se raviser et répugne à nous guider.

Nous errons plusieurs heures et enfin le cacique nous dit s’être perdu. Chose stupéfiante pour un Indien. Il ne se souvient plus, l’âge a fatigué ses yeux qui fuient les nôtres. Nous avons compris et nous n’insistons pas. Ce serait maladroit.

— Retournons au village, Malhoa…