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mine aussitôt que l’un des lutteurs, fléchissant sur ses jarrets, s’écroule sur le sol, écrasé par le poids de l’autre. Le groupe auquel appartient le vainqueur pousse un hurlement de joie. D’autres lutteurs s’affrontent. L’aube déjà blanchit le ciel.

Les tatouages sont rafraîchis. Malhoa semble plumé vif.

C’est alors une grande lutte. Les danseurs s’affrontent à la borduna. Les coups sourds des matraques de bois de fer heurtant les crânes et les poitrines résonnent et font trembler. Il y a des Indiens qui tombent, proprement mis hors de combat, le torse bleui, le crâne saignant. Les autres n’en ont cure. Ils redoublent de fureur, se joignent, s’étreignent avec force, frappent…

Le sang ruisselle. Quelques-uns des guerriers semblent devenus fous et hurlent à la mort, le visage terrible, la bouche dégouttante de bave. Ils tapent, ils tapent toujours, comme pour s’exterminer, insensibles aux coups, ignorant les blessures. Et comme si ce n’était pas assez, délaissant les matraques, ils enflamment des torches de résine et les projettent, se poursuivant inlassablement jusqu’à décider du vainqueur à grands jets de torche. L’air est plein de ces paraboles élégantes et lumineuses qui nous éclaboussent d’étincelles, grésillant sur les peaux.

Il y en a qui prennent feu et courent en geignant se plonger dans la rivière. Malhoa, déchaîné, ne semble plus nous voir. Il conduit son clan avec intelligence et domine nettement la lutte. De spectateurs, les vieux deviennent acteurs, ne pouvant résister plus longtemps au plaisir d’échanger des horions.