Page:Maufrais Aventures au Matto Grosso 1951.djvu/230

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

parfait. A l’intérieur de ce cercle, un guerrier s’avance, l’échine basse, il hésite, feint de se retirer, revient sous les quolibets de ses camarades, cherche son ennemi, le trouve, le défie, l’insulte, puis il regagne sa place à petits pas, avec des grognements satisfaits, jusqu’à ce que son adversaire réponde au défi avec le même cérémonial.

A cet instant, les deux hommes s’avancent au milieu du cercle, s’affrontent un instant du regard et enfin s’empoignent avec des ahanements sauvages, les mains jointes à la nuque en un étau inexorable, épaule contre épaule, le bassin largement dégagé, les jambes arc-boutées, nerveuses et dansantes, esquivant et donnant des coups de talons secs aux chevilles ou aux mollets, se glissant insidieusement pour faire trébucher jusqu’à réussir le croc-en-jambe qui mettra fin à la lutte.

Les lutteurs tournent en rond pour se donner davantage d’élan, excités par leurs cris, par ceux de leurs amis et adversaires, par leurs défis qu’ils répètent inlassablement, qu’ils râlent dans l’étreinte forcenée. Ils énumèrent leurs qualités de guerrier, le nombre d’ennemis tués, vantent leurs forces, se moquent de l’adversaire, se promettent la victoire, les yeux révulsés, hors d’haleine, les lèvres blanchies d’écume, tournant, tournant toujours avec de brusques torsions et un jeu de jambes digne d’éloges.

Les muscles tendus semblent de bronze, les corps luisent et reflètent le brasier, les ombres des lutteurs s’affichent sur les cloisons de bambous de la case des fêtes, démesurément agrandies.

Ces deux-là sont de force égale, mais l’habileté enfin les départage. Quoique violente et sans merci, la lutte se ter-