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années s’écoulèrent très vite, l’enfant grandit, ses formes prirent une fière tournure, et, aux prémices de la puberté, le cacique convoqua les tribus avoisinantes à un grand « tataupaua »[1]. Les guerriers vinrent nombreux. Il y eut des danses, des luttes, des chants. C’est alors que la sacrilège fut amenée dans une grande case et violée par les Indiens rassemblés au vu et au su des femmes et des enfants de la tribu. Le sorcier se réserva le « jus primæ noctis », l’orgie dura longtemps. Au matin, la gamine était morte.

Au cas fort improbable où elle en eût réchappé, elle prenait aussitôt rang de fille publique. Celles-ci vivent dans une case spéciale un peu à l’écart du village. Elles dressent avec de la glu une touffe de cheveux sur le sommet de leur crâne et ont pour devoir de distraire les jeunes garçons célibataires qui rémunèrent leurs faveurs en les nourrissant. Ces prostituées, en général, sont des femmes adultères, des veuves sans soutien, des sacrilèges. Leur punition n’est pas sans appel, si un jeune Indien s’éprend de l’une d’entre elles, il peut l’épouser, la femme reprend alors ses droits à une vie normale.

Comme disait Malhoa :

— J’ai un fils. C’est un homme, mais il n’est pas encore marié. Comme il n’a pas de femme, il peut être tenté de prendre celle du voisin. Ça fera la guerre. Alors on lui en donne une qui est à tout le monde…

Si la confection des parures de danse est un mystère fort bien gardé, la protection des ornements de l’aruana est assurée par une troupe de jeunes guerriers vigilants

  1. Banquet.