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épandue sur la poussière ardente où traînent des pieds nus.

On crève d’ennui et de chaleur ; on achète un grand chapeau de paille et l’on décide l’ensemble très couleur locale.

Puis, il y eut les heures merveilleuses, où le navire, longeant d’étroites lagunes de sable doré, tranchait une mer calme, laiteuse par endroits, émeraude ailleurs. Des vaguelettes grignotaient à petits coups de franges écumeuses des récifs à fleur d’eau, la côte imprécise défilait doucement. On n’entendait plus la machinerie, cependant que l’étrave ridait la nappe huilée d’une mer transparente.

De minuscules plagettes nichaient au creux de falaises ocrées couvertes d’une végétation dense d’où émergeait l’élancement grêle des cocotiers se dessinant sur un ciel violacé.

Ces matins-là, des troisièmes aux premières, tout le monde grimpait sur les ponts ; surgis des entrailles du navire, on découvrait des visages nouveaux que la houle contraignait jusqu’alors à une claustration complète dans des cabines étroites puant le fer rétamé.

Pyjamas, slips et peignoirs se portaient avec le même sans-gêne ; les belles ensommeillées semblaient une caricature de ce qu’elles étaient la veille, les messieurs étaient barbus et les gamins morveux.

Après les îles, il y eut la mer. Quinze jours encore. Sur la carte du bord épinglée à l’angle du fumoir, les petits drapeaux marquant notre route couvraient peu à peu l’itinéraire prévu.

Puis, un jour, sans crier gare, ce fut Rio de Janeiro.